Déjà sacrée « championne du monde de mathématiques » en Europe, en 2021, la lycéenne de 16 ans vient de remporter un nouveau concours, renforçant encore son image d’icône de l’excellence continentale.
Un trophée – un de plus – va s’ajouter à tous ceux qui ornent déjà le mur de sa chambre de jeune fille. Le 24 janvier, Faith Odunsi, lycéenne âgée de 16 ans et scolarisée à l’Ambassador College d’Otta, une ville de l’État d’Ogun située à une quarantaine de kilomètres au nord-est de Lagos, a remporté sans difficultés l’édition 2022 du concours national des Olympiades.
Organisée par le Centre national de mathématiques du Nigéria, ce concours réunit les meilleurs élèves du pays et les soumet à des tests de rapidité. Ce 24 janvier, la jeune Faith a pulvérisé la concurrence, répondant au nombre record de 19 questions en soixante secondes.
Souvent, elle fournit la solution avant même que l’animateur ait fini de lire la question
Le principe du concours est simple : un animateur bombarde les jeunes candidats de questions. Il s’agit de résoudre des opérations mettant en jeu des règles ou des théorèmes plus ou moins complexes, mais surtout de trouver la solution le plus rapidement possible. Et c’est dans ce domaine que la lycéenne impressionne le plus. Souvent, elle fournit la solution avant même que l’animateur ait fini de lire la question.
Dans le cercle des milieux académiques nigérians, Faith Odunsi n’a rien d’une inconnue. Elle bénéficie même déjà d’une petite notoriété au sein de la communauté internationale des mathématiciens. C’est en mars 2021 qu’elle a réalisé sa plus belle performance en remportant le Global Open Mathematics Tournament, organisé au Royaume-Uni. Réunissant des jeunes venus du monde entier, cette compétition couronne chaque année un ou une « champion du monde de mathématiques », et même si l’importance de ce titre reste toute théorique, la victoire a valu à la jeune fille un véritable moment de gloire médiatique lors de son retour au Nigeria.
Le jeune frère de Faith, Olapido, participe lui aussi à des concours du même genre
Les chaînes de télévision ont défilé dans la classe et au domicile de la lycéenne, interrogeant camarades, professeurs et parents. Tous évoquent une élève « calme », « très logique et méticuleuse », et affichant depuis son plus jeune âge des capacités hors normes. Le jeune frère de Faith, Olapido, participe lui aussi à des concours du même genre. Et leur père, Afolabi, chirurgien, a lui-même brillé dans ces compétitions de calcul lorsqu’il était étudiant. « J’ai participé à des concours au niveau national, se souvient-il. Mais ma fille a déjà largement dépassé mon niveau. »
Cela fait plusieurs années déjà que la lycéenne dispute des compétitions mathématiques nationales, panafricaines ou internationales, et elle n’en est pas à sa première couronne nigériane de « reine des mathématiques ». Mais c’est le titre mondial décerné en 2021 au Royaume-Uni qui a provoqué le plus d’enthousiasme dans les médias du continent. Beaucoup l’ont alors érigée au rang de fierté africaine, soulignant qu’elle avait triomphé d’élèves venus des cinq continents, y compris de pays réputés pour leur excellence dans les matières scientifiques. Lors de la phase finale du concours, elle était opposée à deux garçons, l’un venu d’Indonésie et l’autre des Philippines.
L’Afrique tient-elle, avec Faith, une future scientifique de très haut niveau ? Président de l’association pour la promotion scientifique de l’Afrique, le physicien et mathématicien français Vincent Rivasseau tient tout de même à relativiser la portée du titre de « championne du monde » attribué à la jeune fille. « Des concours comme celui qu’elle a remporté sont avant tout axés sur les jeunes, et il s’agit d’abord de mesurer la vitesse à laquelle ils parviennent à répondre à des questions mathématiques assez faciles », souligne-t-il. Avant d’avouer qu’il n’avait, personnellement, jamais encore entendu parler de Faith Odunsi. « Ce qui ne veut pas dire grand chose, tempère-t-il, car je ne suis absolument pas sur les réseaux sociaux ou ce genre de choses. »
L’appel de l’étranger
La « génie des maths » d’Ibuje a encore beaucoup à prouver, c’est certain. Mais en matière de maîtrise des principaux concepts mathématiques et de vivacité d’esprit, elle se situe déjà très au-dessus du niveau des adolescents de son âge. Lorsqu’on l’interroge sur son avenir, la jeune fille, sagement vêtue de l’uniforme de son lycée, évoque son intérêt pour les nouvelles technologies… Et se verrait bien poursuivre son cursus à l’étranger.
Ses parents, quant à eux, estiment que leur fille ne doit pas négliger le symbole que représentent ses succès pour son pays, et même son continent. « Elle montre de quoi les Africains sont capables, et je pense que cela doit tous nous inciter à essayer de conserver nos talents. À faire en sorte qu’ils ne quittent pas leur pays pour aller réussir ailleurs, comme c’est trop souvent le cas. Surtout pour les filles », insiste son père. Reste à savoir si Faith, qui a maintenant 16 ans et accomplit son année de terminale, écoutera leur conseil.
Source : Olivier Marbot | Jeuneafrique